Des relevés archéologiques de 1975-1978 ont révélé des traces d’habitat de plein air sur une surface de 6 ha à proximité de la corvée le Moine (actuel Pokeyland). Seul du mobilier archéologique a été trouvé : armatures de flèches pédonculées, haches polies en silex, fragments de poteries … Le site a été attribué au néolithique Bronze ancien (2000 -1800 avant JC). Il pourrait s’agir d’un habitat du groupe mosellan mis en évidence dans les grottes sépulcrales de Novéant-sur-Moselle et Bayonville-sur-Mad.
Féy se trouve à l’écart des voies romaines principales qui se croisaient à Metz (Divodurum Mediomatricum). En effet, la voie sud-nord Lyon – Trèves rejoignait Metz par un tracé proche de l’actuelle D15. La voie Est-Ouest Reims-Strasbourg rejoignait Metz par un tracé proche de l’actuelle D903.
Le site de Féy a pu être traversé par un diverticule menant de ces voies principales vers les côtes de Moselle (Arry, Lorry-Mardigny, Rupt-de-Mad) où des traces d’occupation gallo-romaine sont avérées. Cela a pu contribuer à l’installation d’un habitat dont on ne trouve cependant pas de traces antérieures à la fin du 1er millénaire.

La réalisation de plans et de cartes par l’atelier des Naudin correspond à une commande du pouvoir royal sur des territoires à enjeu, particulièrement dans les régions frontalières allant de Dunkerque à la porte des Flandres et Lauterbourg dans le nord de l’Alsace.
Les premières traces toponymiques sont datées du bas Moyen-Age. Elles sont issues du latin Faiacum. En latin, la terminaison ACUM désigne le lieu où demeure quelqu’un ou quelque chose (qui a donné la 1ère partie du nom, en l’occurrence hêtre, donc Faiacum = lieu planté de hêtres, hétraie). On peut également trouver Fagidum, ou Fagitum vers l’an 800.
En 893 l’endroit apparait ensuite sous le nom de Fagit suivi de Fao en 936. Cette terminaison est devenue Y ou EY en langue d’oïl.
A partir du XIIIè siècle (vers 1260) Féy commence à être nommé comme groupement d’habitations sous divers noms successifs : Feys en 1320, Fayt en 1348, Feyt en 1404, Faiyt en 1437, Fait, Fay en 1490, Féey en 1513, Faey en 1603, Fay en 1734.
En 1734 la carte des Naudin mentionne le lieu sou le nom Fay (Cf. médiathèque de Metz).

Réalisée par la famille de cartographes Cassini entre 1756 et 1815, la Carte générale de l France est la première carte générale et particulière du royaume de France. Composée de 180 feuilles accolées, elle donne une vision d’ensemble du royaume dans ses frontières de l’époque. Faye se trouve sur le feuillet 141 (Metz).
En 1760, la carte de Cassini mentionne le lieu sous le nom Faye
Le village s’appelle Féy depuis la fin du XVIIIème siècle. Il est attaché au canton de Corny (1790). Il est passé dans celui d’Augny par l’organisation territoriale de l’an VII (Directoire – 1799). En 1802, le village est rattaché au canton de Verny. L’administration lui annexe les fermes de Sommy et de la Valaine ainsi que la tuilerie.
Source : Bouteiller – Dictionnaire topographique ancien du département de la Moselle
Féy suit le sort de la ville de Metz. Après la chute de l’empire romain, Metz devient terre du Saint empire romain germanique, incorporé au royaume de France en 1552.
Le village faisait partie du secteur L’isle (ou entre deux eaux) du pays messin Ce secteur regroupait 13 villages au sud de Metz entre Seille et Moselle (Montigny, Jouy, Augny, Marieulles …). Jusqu’à la révolution, les terres appartenaient au chapitre de la cathédrale Saint Etienne de Metz.

Parti d’azur au hêtre arraché d’or et de gueules au dextrochère de carnation, vêtu d’azur, mouvant d’un nuage d’argent tenant une épée du même garnie d’or, accostée de deux cailloux du même.
Dextrochère : en héraldique, un dextrochère est un bras droit représenté plus ou moins vêtu, tenant le plus souvent une épée. La partie gauche du blason représente le hêtre. A droite, l’épée haute accostée de deux cailloux d’or sont des armoiries des communes dépendantes du Chapitre de la Cathédrale de Metz. On retrouve la même partie du blason sur les armoiries des communes de de Achatel, Foville, Jury, Mécleuves et Pontoy. Pourquoi l’épée ? Les patrons du chapitre sont Saint Paul, décapité à Rome vers 64 (l’épée) et Saint Etienne, lapidé à Jérusalem vers 35 (les deux cailloux).
Au plan religieux, Féy faisait partie de la paroisse d’Augny jusqu’en 1839. Une vieille petite église, située dans le cimetière actuel, servait de lieu de culte, annexe d‘Augny.
VU notre état de présentation en date du 7 novembre 1838, relatif à l’établissement d’une succursale dans la commune de Féy, canton de Verny, de notre diocèse,
VU l’ordonnance royale du 30 janvier 1839, qui agrée notre proposition,
NOUS, évêque de Metz le Saint nom de Dieu, invoqué, de l’avis de notre conseil, avons érigé et érigeons, en ce qui concerne, pour qu’elle jouisse de tous les privilèges attachés à ce titre, et la séparons de l’Eglise succursale d’Augny, à laquelle elle a appartenu jusqu’à ce jour,
Assignons à la nouvelle succursale le territoire de la commune de Féy pour circonscription paroissiale,
NOUS nous réservons de nommer pour la desservir suivant le droit qui nous appartient en qualité de premier Pasteur du Diocèse, tel Prêtre digne et capable que nous jugerons convenir à cette place,
ORDONNONS qu’un Conseil de Fabrique soit formé dans ladite Eglise, conformément au décret du 30 décembre 1809.
Et sera notre présente Ordonnance notifiée au sieur Archiprêtre de Pournoy-la-Grasse et au Desservant d’Augny, afin que chacun n’en ignore et la transcrive sur le registre des Délibérations du Conseil de Fabrique de ladite Eglise, dès que le Conseil aura été organisé.
DONNE à Metz, sous notre seing et le sceau de nos armes et contreseing de notre Secrétaire de l’Evêché, l’an de grâce 1839, le 12 février ;Signé : Jacques François, Evêque de Metz
Marty, Secrétaire
La première pierre d’une nouvelle église a été posée et bénie en 1859 par Monseigneur Paul Georges Marie Dupont-Des-Loges, évêque de Metz. La famille messine Piquemal a contribué financièrement à sa construction. Dans l’entrée de l’église, une longue épitaphe rappelle la générosité de cette famille.
Les habitants ont le privilège d’être affublés d’un sobriquet en patois : « piat féyou, grand blagou » qui signifie piètres faiseurs mais grands blagueurs !
Le village d’origine de Féy était un village tas (par opposition au village rue). Il s’est développé en cercle autour de la maison seigneuriale dont il ne reste aujourd’hui que les dépendances (Castel Féy). C’est la structure traditionnelle des villages de vignerons des côtes de Moselle. Les registres de la paroisse confirment qu’aux XVIème et XVIIème siècles le village était essentiellement peuplé de vignerons.
Au pourtour du village, les habitations et les fermes se prolongent par des jardins souvent clos qui assurent la transition vers les espaces agricoles.
Le sous-sol argileux de la commune permet la création d’une tuilerie, déjà présente sur les cartes des Naudin ou de Cassini, qui complète son activité essentiellement agricole. L’extraction des terres nécessaires à la tuilerie se faisait à l’endroit de l’actuel lotissement des Balency, comblé après la guerre par les décombres du village. L’activité de la tuilerie s’est arrêtée en 1929 pour se substituer à une activité agricole. Le ferme, reconstruite après-guerre, est devenue l’hôtel restaurant Les Tuileries en 1992.
Féy est donc au XIXème siècle un village essentiellement viticole et agricole. Il comptait 260 habitants en 1817, 270 en 1844 puis 337 en 1852. A noter qu’une épidémie de choléra a durement touché la commune en 1832. Entre le 9 août et le 20 septembre, 57 habitants sont décédés de cette maladie. Une stèle dans le cimetière rappelle leur décès.
En 1871, à la suite du traité de Francfort qui mit fin à la guerre franco-allemande, l’actuel département de la Moselle fut annexé par l’Empire allemand et intégré au territoire impérial d’Alsace-Lorraine. Féy devint alors une localité allemande sous le nom de Buch-In-Lothringen (1871-1918).
Féy redevint française en 1918 à l’issue de la Première Guerre mondiale. Sa population était retombée à 236 habitants.
Témoignage : la vie à Féy avant la guerre
« M. Heymes, l’instituteur, nous a laissé le souvenir d’un homme très exigeant. Pour aller passer les épreuves du Certificat d’Etudes, les élèves partaient en carriole tirée par un cheval jusqu’à la gare de Coin-lès-Cuvry. De là, ils prenaient le train jusqu’à Verny où avaient lieu les épreuves.
Les enfants sortant de l’école à midi, allaient chercher des bonbons chez Hortense Bauer, l’épicerie qui se situait à l’emplacement des boites aux lettres, devant chez Mme Fisher, 15 rue de l’Abbé Marchal ; une épicerie qui empiétait largement sur la route actuelle. Mais Mme Hortense n’était pas toujours contente d’être dérangée à l’heure du repas.
Les messieurs se retrouvaient souvent au café Ruze dont l’emplacement se situait sur la place actuelle. Là se trouvait un jeu de quilles dans la grange et c’était là aussi que l’on portait les fruits ramassés en grand nombre à l’époque, que Jules Matthieu, mari de la Mentine (Clémentine) pesait.
Les fraises, cultivées surtout sur les coteaux de Sommy, étaient à l’époque une grande culture. Les producteurs faisaient venir des polonaises et des sarroises pour la cueillette. Puis les fruits étaient portés à la distillerie chez Maurice Antoine (actuellement chez M. Ferrera).
Il y avait aussi la régie à la place de l’actuel monument aux morts, tenue par les familles Maringer – Massinet, grands-parents et parents des familles Conrard, Grosclaude et Garcia.
A la place de la maison de M. et Mme Clausse, rue du château d’eau, se tenait le café de Mme Hélène Ott.
Les chaussures et toutes pièces de cuir étaient réparées chez M. Jalvé (actuellement la maison Favier).
Qui s’occupait de ferrer les chevaux et de cercler les roues de carrioles ou des chars à bancs ? Les parents de Mme Poinsignon, rue de la forge. D’ailleurs, M. Villers était aussi maire pendant la guerre.
Qui fabriquait et réparait les tonneaux pour mettre le vin des vignes des coteaux ? M. Charles Lehair.
Qui nous communiquait les informations communales au tambour ? M. Pillot, père.
Qui a été au lavoir ? Mme Schenke est la seule d’entre nous à s’en souvenir.
On ne parlait pas beaucoup de chômage à l’époque ! Tout le monde vivait de ses lopins de terre ou vivait de ses fruits, de ses légumes, de volailles et de lapins.
Où se faisaient les couarails ? Dans la rue principale ! On sortait bancs et chaises le long de cette rue.
…
Ce qui était attendu avec impatience, c’était la fête du village, pour la fête de Saint Pierre aux Liens, le premier dimanche d’août.
On dressait une estrade en bois entourée de branchages ou d’arbustes et tout le monde dansait.
Les enfants venaient chercher leurs bonbons auprès de M. Thill de Mardigny.
…
Le meilleur souvenir de ces temps heureux ? C’était de parler, de se rencontrer.
Bulletin rencontres Fagiennes – date indéterminée
Le village fut de nouveau annexé par l’Allemagne en 1940. Durant cette seconde annexion de la Moselle, Féy pris le nom de Buchen-Bei-Metz (1940-1944).
Comme d’autres, les habitants du village furent expulsés en septembre 1940 par la politique de germanisation pratiquée par l’occupant en Alsace-Moselle. Les habitants de Féy furent déplacés à Bersac en Haute-Vienne. Sur 207 habitants en 1939, 192 furent expulsés.
La bataille pour la libération de Metz (septembre-novembre 1944) fut fatale. Située sur la ligne de front, à proximité des forts Sommy et Saint Blaise, les bombardements et les combats détruisent le village à 95%. La France reprend possession du village ruiné le 20 novembre 1944.
Il y avait 70 maisons en 1939, 51 furent entièrement détruites et 19 endommagées. Au milieu des décombres, seuls trois bâtiments anciens subsistent :
- L’ancien presbytère, rue de l’Abbé Marchal. Cette construction massive a été intégrée au plan de reconstruction du village
- La mairie école, maison traditionnelle lorraine à laquelle a été ajoutée dans les années 50 une nouvelle entrée pour l’école. Aujourd’hui, le bâtiment ne sert plus que de mairie.
- La mairie a été restaurée en 1949 et inaugurée le 21 mai 1950 en présence d’une délégation de la commune de Francheville (Rhône), marraine de guerre de Féy.
- Les dépendances du château qui constituent le seul vestige du château féodal. Transformée en maison d’habitation et maison d’hôtes (Castel Féy), sa façade porte encore les stigmates des combats de 1944.
Par décision du 1er juillet 1948, le secrétaire d’Etat aux Forces Armées, Max Lejeune a cité la commune de Féy et lui a attribué la Croix de Guerre avec Etoile d’Argent.
« Aux trois quarts détruite par les bombardements et les combats acharnés qui ont été livrés sur son territoire, Féy, dont la population a été expulsée presque en totalité, a supporté toutes ses épreuves avec un courage admirable.
Par ses sacrifices, son attachement à la France, Féy s’est acquis des droits à la reconnaissance du pays. »
La remise de la Croix de Guerre a donné lieu à une importante cérémonie le 12 décembre 1948.
Le village a été reconstruit entièrement dans les années 50. Il n’a pas conservé sa configuration ancienne issue de l’histoire. La reconfiguration du village est l’œuvre d’un architecte de la reconstruction : Eugène Brégand.
Il a voulu une configuration moderne et rationnelle. Le nouveau centre du village est constitué par une grande place au fond de laquelle l’église a été reconstruite sur les fondations de l’ancienne.
Les bâtiments de la reconstruction se composent :
- De maisons d’habitation mitoyennes (Place de l’Eglise, haut de la rue de l’Ecole, rue des Mirabelles, rue du Château d’Eau). Sur une idée de l’abbé Bréger, les façades des maisons autour de la place de l’Eglise possèdent une petite niche destinée à l’accueil d’une statuette religieuse.
- Et de propriétés agricoles (rue de l’Abbé Marchal). Construits sous forme de longères, ces bâtiments ont progressivement perdu leurs fonctions agricoles pour se transformer en maisons d’habitation.
Depuis la reconstruction jusqu’aux années 70 le village se développe par de nouvelles constructions diffuses le long de la départementale et la rue principale (rue de l’école).
Le 16 décembre 1972, la partie au sud de Metz de l’A31 a été inaugurée dévoilant ainsi la 1ère sortie au nom du village de Féy. Cela a tiré la commune de l’anonymat et accru son intérêt résidentiel. Cette date marque le début de l’extension pavillonnaire.
Un lotissement de 63 pavillons voit le jour sur le site de l’ancienne tuilerie. Il conduira au doublement de la population locale. Depuis, la multiplication de lotissements a définitivement transformé cet ancien village rural en village résidentiel de l’agglomération messine.
1792 | Lejeune Simon | ||
1793 | Claude Charles | ||
1794 | Dudevant François | ||
1864 | 1882 | Hennequin Louis-Etienne | Cultivateur |
1882 | 1886 | Simotte Nicolas | Vigneron |
1886 | Mai 1896 | Antoine Pierre | Jardinier |
Mai 1896 | 1903 | Bauer François | Cultivateur |
1903 | Décembre 1919 | Thuillier Prosper | Cultivateur |
Décembre 1919 | 1938 | Auguste Pierné | Cultivateur |
1938 | Mai 1945 | Viller Gaston | Maréchal-Ferrant |
Mai 1945 | Février 1956 | Bardoux Georges | Employé de banque |
Février 1956 | Mars 1965 | Chery Germain | Cultivateur |
Mars 1965 | Mars 1977 | Dufour Raymond | Employé SNCF |
Mars 1977 | Mars 1991 | Loison Bernard | Inspecteur commercial |
Mars 1991 | Mars 2001 | Bourgeois Bernard | Cadre commercial |
Mars 2001 | Mars 2008 | Forey Jean-Paul | Ingénieur retraité |
Mars 2008 | Juillet 2020 | Strozyna Joël | Géomètre expert |
Juillet 2020 | Dumont Michel | Retraité |
Une seule rue du village porte le nom d’une personne : l’Abbé Marchal. Qui était-il ? Alfred Marchal est né en 1862 à Lubécourt près de Château-Salins. Avant de venir à Féy, il fut curé dans les Ardennes à Daigny, près de Sedan. C’est à l’âge de quarante ans qu’il fut incardiné au diocèse de Metz, d’où il était originaire.
Son action pastorale
Aux dires des anciens qui l’ont connu, l’abbé Marchal était un prêtre d’une grande rigueur doctrinale et morale, ardent défenseur de la foi et de la vie chrétienne. Certains le disaient d’une grande sévérité, soulignée par une grosse voix de paysan lorrain. Sa maigreur lui donnait un visage ascétique mais ses yeux trahissaient une grande bonté et un humour qui équilibraient son sens du devoir et laissaient deviner des sentiments profondément humains.
Dès son arrivée à Féy, il mena de pair la restauration du spirituel et du temporel dans la paroisse.
Il remit à jour les vieilles confréries de la prière et inventoria tout ce qu’il y avait de valable sur son territoire pastoral. Les registres paroissiaux et le journal des délibérations nous racontent ses premiers travaux de restauration de l’église qui n’était pourtant pas très vieille (1859).
Dès Quasimodo 1903 (deuxième dimanche de Pâques), il envisagea la pose de fenêtres de protection à l’extérieur des vitraux. Il écrivait : « Le séjour à l’église pendant les grands froids de l’hiver était particulièrement pénible à cause d’un puissant courant d’air arrivant par 13 grandes baies vitrées disloquées par les intempéries et les orages violents ». Il fut donc décidé de doubler à l’extérieur les 13 vitraux par du verre dépoli de 6mm d’épaisseur. La dépense était considérable ; il fallait 117 m2 pour un devis de 1 400 marks or.
En 1905, l’usure des coussinets des cloches était telle qu’on ne pouvait sonner que très difficilement les cloches à la corde (il n’y avait pas encore d’électricité).
En 1906, la ferme de Sabré fut rattachée à la juridiction pastorale de Féy après avoir été détachée de Cuvry.
En 1912, grand branle-bas de travaux à l’église : il fallait refaire l’intérieur de l’église, les plafonds, les murs, la peinture pour un devis chiffré à 12 000 marks or par l’architecte Ochs.
Son action sociale et syndicale
Comme tout curé d’avant-garde à l’époque, l’abbé Marchal créa à Féy une Caisse Mutuelle Agricole de Dépôts et de Prêts, l’équivalent d’une Caisse d’Epargne locale aux dimensions des besoins de Féy. Cette caisse permettait l’autofinancement de la collectivité et des particuliers, tout en donnant des intérêts aux déposants.
C’est ainsi que ladite Caisse permit à beaucoup d’acheter ou de réparer une maison, d’acheter un champ ou une machine agricole. Les crédits étaient accordés aux habitants de Féy contre un léger intérêt, redistribué aux déposants.
L’abbé s’occupa aussi activement des achats groupés de semences, de charbon, de ravitaillement divers. Il pratiqua même de l’Assurance Mutuelle Incendie et payait souvent à la place des négligents et des retardataires pour les tenir en règle avec la Mutuelle Incendie de Chaumont. La Caisse Mutuelle des Dépôts et Prêts était elle-même affiliée à la Banque Fédérative Rurale de Strasbourg et régulièrement inspectée par des comptables assermentés. Féy fut une des premières Caisse du secteur avec Sillegny et Lorry-Mardigny.
Son action fut éminemment bénéfique sur le plan social et économique. Sa caisse était l’une des fiertés de l’abbé Marchal. Il faut dire que créer une mutualité parmi les cultivateurs très indépendants et individualistes à outrance constituait un exploit et n’allait pas sans difficultés.
La fugue de l’abbé Marchal
En mars 1914, l’abbé Marchal demande son changement à l’Evêché. Il réunit le conseil de fabrique le 17 mars et, en présence de l’archiprêtre, remet sa démission en même temps que ses comptes.
Que s’est-il passé dans son esprit ?
Pour les non-initiés, le geste restera étrange et l’explication difficile. Peut-être certains ont-ils lu le roman de Jean Montaurier qui décrit l’état d’âme d’un archiprêtre qui plaque sa paroisse et ses intrigues pour faire une fugue avec de braves pêcheurs en mer.
Au bout de dix-douze ans dans une même paroisse se produit assez fréquemment une crise profonde chez le prêtre, sensible à la lourdeur de la pâte humaine, aux incompréhensions, à l’indifférence, aux tensions trop humaines. L’inefficacité de son action lui pèse et le submerge. Il se débat seul avec ses états d’âme. La fugue le tente à ce moment-là. Alfred Marchal s’est enfui avec ses problèmes à Lorry-Mardigny de mars 1914 au 1er octobre de la même année.
Les paroissiens de Féy – c’est à leur honneur – lui ont rendu visite lors de l’Adoration Perpétuelle à Lorry. Les retrouvailles furent émouvantes ; on pleura de part et d’autre : l’amour reprenait le dessus et l’abbé revint à Féy avec les siens pour une deuxième lune de miel. « Je n’ai fait que deux bêtises dans ma vie » avoua-t-il, « la première fut celle de venir à Féy, la seconde de m’enfuir de Féy ».
Ses dernières années
Il prit sa retraite de curé en 1938 mais demeura sur place pour continuer à partager la vie de ses anciens paroissiens.
Sur ses vieux jours, surtout après le retour de l’expulsion en 1945, l’abbé Marchal se détacha de tous ses biens et vécut dans la pauvreté. On le voyait pieds-nus dans ses grands sabots lorrains. Il flottait littéralement dans sa vieille soutane verdie. Parfois, on le rencontrait portant sa gamelle de soupe qu’il cherchait à la cantine des prisonniers de guerre allemands. Il était aussi pauvre qu’eux et sans fierté.
L’abbé Marchal tomba malade aux environs de Noël 1949 lors d’une visite à sa famille. Il mourut à Lubécourt en avril 1950 et fut enterré au cimetière d’Amelécourt. Ce n’est qu’après la restauration de la chapelle, en 1980, que son corps fut rapatrié à Féy pour y être inhumé.
Son souvenir
Ce qui était attachant chez ces vieux curés, ce n’était pas la technique de leur pastorale, le brillant de leur savoir-faire (l’abbé Marchal est toujours resté un vieux paysan lorrain), c’était leur humble foi en Dieu et en l’homme, malgré les insuffisances et les bavures, leur cœur d’or derrière la rudesse et les aspérités de leur verbe et de leur caractère.
En devisant joyeusement avec l’équipe de restauration de la chapelle, l’un d’entre eux me disait : « On l’a fait tellement belle sa chapelle qu’il ne voudra plus s’en servir le jour du Jugement ». Certes, il n’aura plus envie de s’enfuir de Féy mais gageons qu’il s’occupe encore aujourd’hui avec sollicitude de ses paroissiens. Après avoir servi fidèlement pendant 35 ans le premier patron de l’église de Féy, Saint Pierre aux Liens, il est devenu patron protecteur de cette paroisse, Alfred l’Enchainé.